• Une séduisante envie de te coffrer [privé]


    Lundi 25 Octobre 2021 à 22:58
    AUREUM.UMBRA

    Titania L. Van Der Guilt: 

    Le quartier Nord avait toujours joui d'une réputation stagnante. Port aux eaux bouillonnantes de travers, il y gisait bon nombre de cadavres d'épaves depuis trop longtemps abandonnées par leur propre équipage. Pathétique réalité après de si loyaux services, cimetière dont s'échappait les bruits lointain du bois craquant sous la pourriture. Ses pavés glissants à la mousse insidieuse, ses âmes oubliées qui y trainent encore leurs carcasses poisseuses. Labyrinthe qui dévore tous ceux qui s'y risquent, digérant avec lenteur les brides de lumière qui osent s'y refléter encore, insolentes. On pouvait y croiser, accolées nonchalamment aux devantures troubles, quelques jupons rougeoyant cherchant du regard à harponner pécheurs mécontents d'une journée de travaille trop harassante ou créature bourrée à l'absinthe bien trop tôt dans cette soirée pour qu'il ne s'y cache un mal-être cruellement encré. Jeux de jambes dans un tréfond de ville bien mal famé. Petits orphelins aux mains baladeuses qui courent entre les mauvaises rencontres, d'étranges paquets aux relents cyniques qui s'échangent sous le manteau. Il y régnait une effervescence bien différente de celle de la cours. Ici, pas de drapés masquant des idées toutes aussi malfaisantes. Pas de parfums rococo qui couvre les tromperies du maris infidèle. Pas de maquillage biblique dissimulant un physique disgracieux. Au moins, cette partie de la métropole avait le mérite d'honnêteté, d'assumer ses peines - voir même de les revendiquer clairement. On savait à quoi s'attendre en posant le pieds entre ses rues lugubres. Chagrin macabre de quelques vils espèces. Dame noyée sous le poids des ignominies qui s'abreuvent à son sein. Inquiétante atmosphère au brouillard grisant, fumées illicites qui s'évadent d'une fenêtre, vomissant dans la rue des effluves épileptiques.

    Au milieu de ce bordel funèbre et bancal, une petite silhouette se découpait. Le nez en l'air à absorber chaque odeur désagréable, à s'imprégner de l'ambiance décadente, un petit bout de femme se consumait sous la curiosité. Titania avançait parmi les autres, aussi éphémère que n'importe lequel d'entre eux. Elle se ravissait du glauque qu'elle n'avait jusqu'ici eu si peu l'occasion de côtoyer, trouvant à ce coin d'amertume une grâce rampante aux allures d'arthropode. Il avait fallut user de beaucoup de ruse pour échapper à la vigilance gardes. Une entreprise rondement menée par la petite demoiselle à l'aide d'un démon farceur toujours prêt à engendrer un chaos certain. La mauvaise idée de s'évader avait ravie Auguste qui s'était dépêché de trouver à son hôte une tenue tranchant avec son accoutrement habituel. Il n'avait ensuite fallut que repérer l'heure de relève pour que la jeune femme puisse se faufiler hors de ses appartements, le cœur battant. Ce n'était pas la désobéissance en elle même qui intéressait Titania, mais ce que ces petites sorties en douce lui permettait de préserver: sa liberté. Un piètre semblant de liberté, certes, mais qui la rassurait quelque peu dans sa condition.

    Bien camouflée sous sa cape, tentant maladroitement de fondre dans la masse les couleurs opalines de son corps, elle déambulait entre les cosmopolites enivrée de tant d'exotisme. Agile et rapide, elle évitait savamment la population en sillonnant parmi eux. Dans un coin si reculé, personne n'aurait eu l'audace de la chercher. Si bien emportée, elle finit par heurter de plein fouet une dame à la dentition douteuse. Le choc la fit basculer et il ne s'en fallut d'un rien pour qu'elle ne se vautre en beauté. L'inconnue ronchonnant avait vociféré quelques médisances grossières. Insultes qui vinrent enrichir le vocabulaire de mademoiselle Van Der Guilt. Ne laissant même pas le temps à Titania de s'excuser, elle avait poursuivit sa route les sourcils terriblement froncés. La poupée au teint pâle était restée scotchée sur place en admirant l'étrangeté s'éloigner avec son onde saugrenue.

    Ses yeux se baissèrent alors, trouvant abandonné à ses pieds, un porte monnaie. La femme bourrue venait sans nul doute de le faire tomber dans la débâcle. La lady, dans un geste relevant plus du reflexe, entreprit de se pencher pour le ramasser. Hélas, encore une fois prise de court par la vivacité d'un étranger, elle n'eut à peine le temps de plier les genoux pour rattraper l'objet égaré que déjà une main immense se refermait sur son col, la soulevant d'une traite en arrière. Les yeux exorbités par la frayeur qu'on venait de lui faire, la bouche entre ouverte de stupeur, Titania paniqua. Sa capuche glissa, libérant au jour une chevelure nacre.

    Mardi 26 Octobre 2021 à 18:33
    Upside

    Corneille d'Aurevilly:

    L'humidité emplissait ses poumons, vieux chien de la campagne voisine, Corneille n'avait pas l'habitude du climat mouillé de la cité portuaire. Ce n'était pourtant pas la première fois qu'il devait s'y rendre mais rien à faire, il n'arrivait pas à s'y faire. Ses cheveux tombaient devant son visage, épis de blés rêches qui rebiquaient doucement sous l'effet de l'air marin, contrastant avec le climat parfois trop sec de Planeceres. Il n'aimait jamais trop sortir de ses terres, préférant de loin l'illusion confortable de tranquillité que lui procurait les environnements connus.

    Mais le capitaine de garde ne traînait pas par ici par choix, ses responsabilités le pesant une nouvelle fois il avait été contraint de devoir se rendre ici, convié à quelques rencontres importantes avec les chefs de garde des cités voisines. Réunions militaires qu'il redoutait toujours, appréhendant quelles révélations rédhibitoires allaient se faire à lui, à redouter d'avoir à envoyer un jour les jeunes dont il se chargeait à l'abattoir. Les cités n'étaient pas en conflit alors il n'y avait pas vraiment de raison, mais on était jamais à l'abri de ces craintes qui guettaient tout bas, grattant l'édifice bancale d'une stabilité qu'on peine à reconstruire, plus fragile à mesure qu'elle s'élève. De plus, un certain banquet plus officiel en compagnie du beau-monde d'une noblesse à laquelle il n'avait jamais appartenu se tenait et sa présence y était évidemment attendue. Témoignage de l'amitié tacite entre leurs gouvernements, vilaine mascarade dont il n'avait aucune envie de porter le masque.

    Il avait du temps à tuer avant que tout ça ne commence. Corneille traînait donc sa silhouette sombre dans une balade hasardeuse, se fondant petit à petit dans la morosité des bas-quartiers de Marenostre où il avait eu l'idée d'aller se perdre. Déformation professionnelle, à faire des tours de garde sans s'en rendre compte. Il avait quitté les belles rues savamment pavées, aux bâtiments richement décorés et aux lumières chaleureuses. Ici sombrait la décadence certaine d'une partie du peuple qui ne pouvait pas se fondre parmi la richesse qu'ils ne possédaient pas, mécréants errant dans une pauvreté honnête parfois trop sincère. Lieux de débauches aux trafics douteux, c'était une ambiance qu'il connaissait trop bien et qu'il avait arpentée à bien des époques différentes de sa vie, certaines moins reluisantes que d'autres. Souvenirs ineffables qu'il ne se plaisait pas à se remémorer. Certaines personnes se retournaient sur son passage, son allure militaire ne passant pas spécialement inaperçue, bien qu'il ait revêtu une cape cachant en partie son uniforme, dans ces ruelles on ne voyait pas les gardes d'un bon oeil. Corneille gardait ses mains contre ses fourreaux, près de ses poches. Nombreux étaient les voleurs aux mains baladeuses qui arpentaient ce genre d'endroit et la richesse ironique de certaines parties de son accoutrement ne passerait pas à la trappe de quelques regards perçants qui avaient le goût pour l'argent. Son regard inquisiteur baissant les yeux de quelques passants tandis que d'autres, plus provocateurs, le soutenaient avec un lueur de défi, l'envie peut-être sourde de créer quelques conflits, de défouler une ardeur propre à ce genre de lieux. Le capitaine cédait souvent, n'étant pas là pour assouvir la soif de violence de sauvages et encore là pour raviver la flamme de la sienne.

    Tandis qu'il continuait son petit tour, une bousculade attira son attention. Une petite personne encapuchonnée avait percuté une femme plus forte qui ne manqua de vociférer quelques mots interdits, langage commun du quartier. S'il avait d'abord pris en peine la petite qui s'était vautrée sur le sol mais ses pensées le quittèrent bien vite quand elle se pencha silencieusement pour ramasser le portefeuille tombée dans la foulée de la malotrue. Il ne lui fallut que deux pas pour arriver à la hauteur du brigand et l'attraper avant qu'il ne pose ses doigts baladeurs sur l'objet de ses désirs.

    D'une poigne peut-être un peu trop ferme, il l'écarta vivement, sa main fermée sur ses vêtement. La capuche du voleur tomba et dévoila une chevelure immaculée qui faisait presque tâche dans la saleté des lieux, encadrant un visage innocent, soulignés par des traits féminins juvéniles. Il eut une pensée à l'idée de la misère qui pouvait pousser les gens à s'adonner à un tel vandalisme, le désespoir qui devait peupler leur quotidien et qui rendait le vol acceptable. Il détailla son minois un instant, légèrement intrigué par la candeur de la petite chapardeuse.

    - Qu'est-ce que tu crois que tu es en train de faire? Finit-il par trancher.

    Il avait un ton sévère, voix naturelle qu'il ne voulait pas intentionnellement réprobatrice. Mais sa carrure se chargeait de le rendre plus ferme qu'il ne l'était, et de son côté il ne cherchait pas réellement à contrebalancer de lui-même cette impression qu'il faisait.

    - Voler les affaires des autres est un délit.

    Il desserra un peu sa poigne tandis qu'il la fit regagner le sol. Il avait peut-être exagéré sur la réaction, il l'avait soulevée lorsqu'il l'avait attrapée, ne pensant pas qu'elle serait aussi légère et aussi facile à s'envoler. Si le vol était quelque chose de mauvais, il ne voulait pas non plus la brutaliser, elle n'avait pas encore commis l'acte quand il l'avait remarquée et ne méritait certainement pas d'être violentée.

    Mardi 26 Octobre 2021 à 22:38
    AUREUM.UMBRA

    Titania L. Van Der Guilt:

    Elle sentit ses pieds décoller du sol avec une aisance déconcertante. Aucune lutte possible, le petit poids plume se retrouva suspendu dans le vide, les bras ballant et les jambes gesticulant pour tenter de se dépêtrer du piège qui venait de se refermer sur ses frêles épaules. Son cœur prêt à exploser sous l'appréhension, elle voyait déjà sa vie défiler devant ses yeux. L'avait-on reconnue? Allait-on la dépecer pour son rang? La marchander contre quelques pacotilles? Ca y est, sa curiosité avait finit par avoir sa peau. Titania se maudissait d'avoir été trop gourmande. Elle se voyait déjà payer son insubordination au prix fort. Demain, on la retrouverait sans nul doute découpée en morceau sur quelques étalages moribondes.

    Titania leva la tête vivement vers l'immense masse hirsute qui la tenait à bout de bras. Entre ses mèches ivoires, ébouriffées par la suite d'évènements, elle distingua un visage aux traits sévères et à la chevelure dorée malmenée. Minois charismatique qu'elle aurait pu observer encore un temps circonspecte si le reflet métallique de l'armure dissimulée ne lui avait pas tapé dans l'œil. Oh non...un militaire. Titania pâlit à cette vision. Signait-il la fin de ses escapades? Si par malheur il lui venait la folie de la balancer à sa propre famille, la jeune femme pouvait dire adieu à ses quelques moments de répits. Les fauves la dévoreraient sans peine. Se faire hacher menu par un passant lui sembla alors une option bien plus douce. En vu du ton intransigeant qu'il employa, Titania supposa que son déguisement avait miraculeusement fonctionné. L'homme ne semblait pas percuter malgré l'impeccable de sa peau et la petite odeur de parchemin fleurie qui se dégageait de son accoutrement. Il allait falloir se sortir au plus vite de cette malheureuse situation, fuir avant que les doutes ne s'immisce dans cette tête si bien faite. La voix de l'inconnu claqua, lourde et singulière. Titania n'avait jamais fait face à une telle réprimande, si frontale, si honnête. Mal entendu qu'elle s'empressa de démentir avec beaucoup de mal.

    - Ce...ce n'est pas du tout ce que vous pensez!

    Sa voix, à elle, se faisait cristal, surprenante, d'une douceur presque grave. Une fois la sécurité du sol retrouvé, Titania embrassa de nouveau son calme habituel. Elle luttait intérieurement pour ne pas céder à l'affolement, mais, forte d'année imprégnée des mesquineries de la cours, son visage ne trahissait plus la peur depuis déjà bien trop longtemps. Les nobles avides de vérité aimaient bien trop se repaitre de ce genre d'instinct primaire facilement lisible sur des traits enfantins. Elle avait donc finit par intériorisé cette faiblesse, toute proche de son cœur, dissimulée là où personne ne pourrait la trouver.

    L'impertinente soutenait donc à cet instant le regard du soldat avec une fermeté qui transcendait sa carrure inférieur. Deux prunelles verte plongée dans les siennes si bleues. Ce garde dégageait quelque chose de terriblement intimidant. Son essence semblait faite de maux douloureux qui creusaient son expression d'une audace que seul les champs de bataille pouvait laisser. Son cache-œil ne faisant que rendre sa silhouette plus effrayante encore. Titania transpirait, elle ne voulait pas se heurter à ce gabarie là.

    - C'était un accident. Je ne voulais en aucun cas dérober ce qu'il ne m'appartient pas.

    Malgré quelques mots élégants et désuets, sa réplique ne semblait pas tellement faire mouche chez son interlocuteur dont l'attitude restait impassible.

    Mercredi 27 Octobre 2021 à 21:07
    Upside

    Corneille d'Aurevilly:

    La petite voix qui se faufila entre les lèvres de la demoiselle de porcelaine résonnait comme des perles qui tombaient doucement le long des marches d'un escalier, tintement cristallin la faisant ressortir un peu plus du décor sombre dans lequel elle se fondait encore quelques instants plus tôt. Elle nia les faits. L'habit ne faisait pas le moine et le temps avait eu raison de la clémence du capitaine. Dans un monde où les chiens sont enragés, on apprend vite à ne pas se laisser avoir par la lueur fourbe qui pourrait essayer de vous faire culpabiliser, à œillade cherchant à tirer sur la corde de votre humanité, stratagème habiles et futé dans lesquels les débutant arrivaient à tomber.

    Sa poigne était restée sur les vêtements de ce qui semblait être une jeune femme, peu enclin à la laisser s'en aller. Il avait l'habitude des voleurs qui attendaient la première occasion pour filer. Plus leur minois était tendre et plus malines étaient leurs idées pour s'éclipser. Si sa voix était hésitante après la première remontrance que lui avait fait Corneille, elle avait gagné en assurance une fois que ses pieds avaient retrouvé le sol. Petite insolente, elle soutenait son regard. Il ne sut pas s'il devait le prendre comme une offense, remettant en question son autorité certaine sur la situation ou s'il devait s'en sentir amusé, petite chose peut-être encore trop inconsciente face à la violence du monde dans lequel elle survivait. Elle avait de l'audace cette demoiselle, et le mérite d'essayer. Rares étaient ceux qui se risquaient encore à lui faire face quand ils croisaient sa route en plein méfaits et il espérait que leur petite altercation la dissuaderait plus tard de recommencer ces petits délits.

    Elle réitéra les excuses. Démentant encore une fois ses intentions. Pourtant le grand blond l'avait vue, sa petite main avide cherchant à s'emparer du bien d'autrui. Il arqua un sourcil, peu convaincu par la chapardeuse.

    - Évidemment.

    Elle ne perdait rien à essayer après tout, si ce n'était sa patience.

    - Tu essayes de me dire que tu t’apprêtais à l'attraper par un malheureux hasard?

    On ne la lui faisait pas comme ça, à lui. Quand bien même elle aurait essayé de lui dire la vérité, ce dont il doutait fort, elle prenait pour son matricule le doute de tous ceux qui s'étaient crus plus rusés que lui avant elle, ayant éradiqué petit à petit la moindre once de pitié qu'il aurait pu avoir à son égard, petite souris piégée entre les griffes d'un fauve.

    Mercredi 27 Octobre 2021 à 22:36
    AUREUM.UMBRA

    Titania L. Van Der Guilt:

    Le "évidemment" le moins crédible qui lui fut donné d'entendre. Ce soldat était bien tenace au plus grand damne de Titania contrainte d'improviser. La vérité ne semblait visiblement pas satisfaire le militaire et son langage corporel ne laisser que peu de doute sur l'issu de son cheminement de pensée. Il la percevait coupable du crime.

    - Absolument.

    Elle répondit dans la foulée sans trahir la moindre hésitation. Fermeté surprenante, l'homme qui la surplombait ne devait pas être habitué à une telle confrontation - surtout provenant d'une minuscule créature. Lui si imposant, elle si chétive. Elle avait de plus en plus de mal à soutenir sa carrure mais tout était bon pour éviter de finir derrière les barreaux. Surtout qu'elle n'avait absolument rien fait de mal pour le coup. L'injustice planait comme épée de Damoclès au dessus de sa tête angélique.

    - La femme qui m'a bousculé l'a fait tombé et j'étais simplement curieuse.

    Dans un élan de lucidité douteux, sa petite joue diaphane vint s'écraser contre la paume de la main gigantesque qui maintenait toujours fermement son col. Ses doigts - à elle - se déposèrent délicatement sur son bras musclé. Sa petite poigne se referma sur celle négligée du géant d'acier. La démesure d'une anatomie opposée à la sienne qu'elle caressa sans vergogne tout le long de l'avant bras. Vu de loin, on aurait pu les confondre pour quelques familiarités comme intimes. Un petit sourire s'afficha au  coin de ses lèvres roses, témoin de l'ultime tentative malicieuse dont elle faisait preuve pour échapper à son asseyant. Quelques unes de ses mèches désordonnées vinrent chatouiller cette peau inconnue, embrasant les petites cicatrices de guerre qui couraient ça et là sur ce corps terrifiant.

    - Voyons, ce n'est pas très beau monsieur le garde de maltraiter une fragile demoiselle.

    Titania était peut être une demoiselle, mais elle était loin d'être fragile. Elle lui asséna, pour appuyer ses dires, un battement de cils des plus maitrisés. Un charme certain dont la fée usait parfaitement. Peut être qu'un regard tendre lui ferait-il de l'effet? Titania en doutait, mais le désespoir pousse parfois dans des retranchements bien sombres.

    Jeudi 28 Octobre 2021 à 17:13
    Upside

    Corneille d'Aurevilly:

    La chapardeuse ne se laissait pas démonter et si le capitaine admirait son franc-parlé, il était un peu moins amusé par la position dont elle se défendait. Elle était bien insolente, cette demoiselle mais il pouvait comprendre le désir qu'elle avait de vouloir lui échapper. Néanmoins, tenir tête à Corneille était une quête bien veine, il avait la tête dure et savait se montrer intraitable, réussissant parfois à faire renoncer ceux qui penserait seulement vouloir se mesurer à lui.

    D'un ton toujours assuré, elle tint un peu plus ses propos, appuyant qu'elle n'était pas une voleuse et que ce n'était pas la curiosité qui l'avait poussé à tendre cette main coupable sur le portefeuille. Imperturbable, il ne cilla pas face à sa nouvelle excuse.

    - Ce n'est pas la peine d'essayer de te justifier, ça ne marche pas avec moi.

    C'est alors poussée par une hardiesse qu'il ne lui aurait pas donnée qu'elle posa sa joue contre sa poigne qui ne voulait pas se desserrer. Mâchoire de pitbull refermée sur les pans de son accoutrement. Contact doux qui s'écrasa contre la rudesse de sa personne, pris de cours, son esprit se vida. On ne lui avait jamais faite celle là. Ses doigts insolents virent se balader le long de son avant-bras sans qu'il ne puisse dire quoi que ce soit.

    On ne lui avait jamais faite celle là, et les quelques regards curieux des rares passants devaient prendre la situation pour ce qu'elle n'était pas. Mis à mal par le tournant que prenait ce qu'il aurait pensé être une arrestation, il fronça les sourcils. La délinquante reprit la parole, petite provocation, elle savait ce qu'elle faisait. Elle n'avait rien de la fragile demoiselle pour laquelle elle se faisait passer. Loin de là.

    - Ce serait bien te sous-estimer que de te réduire à une fragile demoiselle.

    Mal à l'aise, il la lâcha, dégageant son avant-bras des caresses qu'elle s'était appliquée à lui donner comme si c'était un supplice qui lui était infligé. Il n'avait pas envie de rentrer dans ce jeu là. Il savait bien qu'en laissant filer son étoffe de sa paume, elle filerait avec mais il avait autre chose à faire. Et une partie de son égo n'avait pas envie de faire bousculer par ce qu'il pourrait bien se dire son compte une fois qu'elle aurait fini son tour de charme, ses cils battants et son visage angélique.

    - File.

    Qu'elle s'enfuit tant qu'il lui en donnait l'occasion. Et puis ce n'était qu'un vol qu'elle ne pourrait de toute façon plus mener à bien, maintenant qu'il était là et qu'il l'avait prise en flagrant délit. Corneille espérait néanmoins qu'elle se garderait de recommencer, bien qu'il en doutât. Les bas-quartiers étaient cruels et laissaient peu de chances à ceux qui les peuplaient d'en réchapper.

    Dimanche 31 Octobre 2021 à 14:06
    AUREUM.UMBRA

    Titania L. Van Der Guilt:

    Il ne la sous-estimait pas. C'était tout à son honneur. Des yeux de biches qui scrutent de haut en bas sa proie. Un grand blond qu'elle prends d'assaut, bafouant bon nombres de règles de bienséances avec une touche relevant presque de l'amusement. C'était à se demander qui soutenait l'autre à bout de bras tant l'insolente mettait toute l'intensité qui lui était donné de rendre palpable sur son parcours. Il lui répondit par un froncement de sourcils désapprobateur. Une sueur froide courra le long de sa colonne vertébrale. Elle avait rarement eu l'occasion de croiser la route d'un personnage si intimidant à la lueur des réverbères. Les ombres découpaient son visage, le rendant plus tranchant encore qu'il ne l'était déjà.

    La justice fut rendue. Alors qu'elle tentait du bout des doigts le représentant de l'ordre, un miracle se produisit. La gêne sembla s'immiscer sous sa prise et l'homme finit enfin par la relâcher. Titania fit un pas en arrière, par reflexe. Elle ne voulait pas prendre le risque de retomber entre ses griffes - surtout qu'elle n'aurait sans doutes pas d'autres chances de lui échapper. Son petit subterfuge tactile avait finalement payé.

    "File."

    Il ne fallut pas lui dire deux fois. Dans un dernier élan, elle lui adressa une petite révérence, des yeux coquins levés vers lui avant de prendre ses jambes à son cou. Elle s'éloigna bien heureuse de sa provocation. Son drapé sombre se fit bientôt avalé par la foule. Sa silhouette fantomatique ne fut alors qu'un lointain souvenir encrée sur la rétine du garde. Rencontre saugrenue au détour d'une ruelle sale.

    ----

    Ce soir là, tout le château était en ébullition. A la façon d'une fourmilière, on pouvait y voir grouiller bon nombres de petites mains s'affairant à toutes sortes de taches. Une effervescente et un soin tout particulier étaient donnés aux préparatifs. Cette nuit allait se tenir une réception capitale pour la nation de Marenostre. Diner dansant qui rassemblerait tout le gratin de l'alliance. Maîtres d'armes, généraux de guerres, ambassadeurs et aristocrates se mêleraient dans une sulfureuse mascarade où se dissimulerait chuchotements et gourmandises. Bal des splendeurs.

    Titania avait toujours vu d'un mauvais œil ce genre d'évènement. Elle les trouvait à titre personnel d'un ennui mortel. Toujours sourire dans un nuage de soies cristallines, paraitre avant d'être au milieu des hypocrites et des intéressés. Sa famille avait toujours utilisé ces occasions pour la placer au centre des connivences, produisant un grand intérêt pour son accoutrement. On lui répétait d'être belle, comme si cela relevé d'un quelconque choix. On la culpabilisait à l'inverse. La rose devait faire honneur à sa famille et charmer d'un regard ministres et puissances. Véritable objet politique.

    L'heure fatidique avait donc sonnée. La nuit avait jeté son voile sur la région diffusant de par les immenses fenêtres une lueur chaude et les quelques brides de musiques qui venait s'en échapper attirant comme des mouches la procession ornée jusqu'à ses portes. La demeure se remplit peu à peu de drapés étincelants, de bouches audacieuses et de coiffes emplumées. Tout le beau monde prêt à se montrer en société, à assisté à l'évènement, à se goinfré des derniers potins de la cours. L'hypocrisie à son paroxysme noyé dans un océan de superficialité. Le monde allait mal et cela commencé aux yeux de mademoiselle Van Der Guilt par la pourriture de ses gouverneurs.

    Titania avait fait le choix méthodique d'attendre avant de se montrer. Vivacité d'esprit qui transparaissait par sa réputation presque intouchable. Son absence faisait frémir et comme prévu les vantards se mettaient déjà à bavarder. L'effet de surprise ravirait ses parents et ils se gargariseraient des regards qu'on leur porterait, des félicitations forcées qu'on leur adresserait. Ce genre de tactiques étranges auquel il fallait se prêter. Le diable se cachait dans les détails.

    Auguste c'était déjà fondu dans la foule, le costume impeccablement taillé d'un vert sombre. Créature à ce jour masculine qui pose son jugement sur la foule bruyante un verre à la main. Il dégageait quelque chose de sinistre adossé contre une colonne dorée. L'expression impassible la plupart du temps, il adressait quelques sourires polis en baisant les mains de quelques curieuses sans grand intérêt. Un démon à la cours, cela faisait jazzer et ce n'était pas pour déplaire au monstre d'élégance qu'il était à l'image de son hôte. Duo spécial qui ne manquait pas d'attiser les passion. Lui, à l'inverse de sa maitresse, adorait ce genre de bouffonneries. Le monde y était peu reluisant et il soufflait ça et là son œuvre macabre.

    La plupart des invités étaient déjà plongés dans la soirée lorsque le crieur vociféra de nouveau. Prenant de court l'assemblée, il annonça: Mademoiselle Titania Lazuli de la maison des roses Van Der Guilt.

    Titania justifia son arrivée tardive par une affaire de famille à régler en urgence. L'histoire était vrai mais il y avait aussi une part de comédie. En effet chaque détaille de l'entrée de la dulcinée était une mise en scène. Les perles de sueurs sur son front, ses cheveux légèrement décoiffés, les affaires, la prestance, même les couleurs de ses bijoux qu'elle avait elle même choisit pour faire passer un message fort au monde. Ils allaient peut être l'aimer ou la haïr pour son rang mais il n'y aurait aucun mal entendu quand à sa véritable nature. Resplendissante.

    Ses parents en contre bas de l'escalier, jubilaient d'avance de voir les yeux accrochés sur la silhouette de leur enfant. Projet malintentionné qui flattait leurs égos. Comme convenu, les gentes dames et les damoiseaux tournèrent dans un réflexe commun leurs têtes apprêtés vers la jeune femme qui apparaissait alors franchissant les premières marches. Une beauté rare avait t-on alors décrit. Digne d'une déesse, à ce qu'il paraissait.

    Ravissante, une perfection voilée de satin. Toute de délicatesse vêtue, son apparition laissa encore bon nombre d'œil exorbités et de bouche bées. Elle avait opté pour une robes vaporeuses redoutable de complexité. Frappante harmonie qui foule le sol lustré. La jeune femme drapée d'or et de blanc au bustier de métal étincelant remontant de ses épaules jusque dans son cou, une poitrine galbée par ce corset singulier laissant quelques courbes apparentes. Détails dentelés si raffinés qui laissaient à découvert des épaules nues et des jambes élancées par la transparence de fentes démesurément frappantes qui seyait à la perfection avec son teint immaculé. Elégance naturelle qui se mouve entre les convive d'une ondulation de bassin. Félines lignes au port de tête ravageur. Une façon désarçonnante de mettre en valeur sans trop dévoiler de peau. Juste assez pour donner l'envie de la frôler, frustration élégante. Délice à admirer qui laissait sur sa route un vibrant intérêt. Une chevelure relevée où se perds fleurs et diamants. Perles dégoulinants dans le vides, crinière ivoire au tressage artistique de négligence dont quelques boucles malines s'évadaient pour encadrer un visage chérubin. Une sauvagerie maitrisée, une provocation dosée avec une précision volontaire. Chef d'œuvre de légèreté. Créature aquatique étrange qui capte toutes las attentions sans efforts.

    Elle avançait. Une confiance en apparence dévorante. Titania, saluait les étrangers. Elle s'adressait à ses interlocuteur toujours droits dans les yeux, manière implicite d'intimidé et de se placer dans un rapport de confiance. Elle appliqua savamment dans un naturel redoutable, petits gestes charmants et tournures de phrases ingénieuses pour capter son auditoire déjà bien avide d'elle. Elle hotta ses gants avec grâce. Révérences magnanimes. L'art de la pâmoison.

    C'est alors qu'au loin, une présence l'attire. Fantôme bien plus pesant que les précédent. D'abord émotion désagréable d'être épiée, pas avec l'admiration habituelle mais bien avec une curiosité et une lourdeur qui vous donne la chair de poule. Instinct de survie qui se révèle, Titania tourne d'un coup son regard anis en sa direction. Là bas, entre deux nobles, elle l'aperçut. Géant d'or à l'armure saillante. Créature de Dieu à la musculature facilement devinable dont la chevelure marque. Homme massif à la carrure respectueuse et à la prestance sinistre. Il l'observait d'une façon inhabituelle, la scrutant de haut en bas sans retenue aucune. Titania ne le reconnut pas immédiatement, un froncement de sourcils comme indice premier. Un frisson qui lui parcourt l'échine. Elle se mit à le fixer de loin avec la même hardiesse. Et c'est alors qu'elle levait son verre en sa direction en signe de salutation, qu'elle comprit. Il l'imita et sa main, grande, sure, ferme, lui revint en mémoire. C'était lui. Le garde. Celui qui l'avait soulevé du sol lors de son expédition illégale. Celui qui l'avait prit pour une vulgaire voleuse. Une ombre passa sur son visage.

    Titania traversa alors un premier état. Le dénis. Elle poursuivit un temps ses rondes quand le regard lourd dans son dos finit par être insupportable. L'aristocrate ne pouvait plus ignorer l'intensité avec laquelle il la dévisageait. Luttant pour ne pas laisser paraitre la panique qui gagnait peu à peu son ventre, elle se mit à devenir anxieuse. Questions qui se chevauchent. L'avait-il reconnue? Si oui, qu'allait elle faire? Enième contact visuel avec lui. Il s'instaurait entre eux régulièrement des coups d'œil intrigués. Leurs regards se heurtant tours à tours dans une valse compromettante. Petit jeu qui n'échappa pas à la ruse d'Auguste. Le démon bien trop amusé de la situation sentait l'odeur nauséabonde des ressentis. Il gloussa dans l'ombre de Titania plus d'une fois. Soufflant du nez bien trop souvent. La demoiselle le savait, il avait comprit mais elle fit mine de l'ignorer ne voulant lui offrir cette satisfaction. 

    La créature des Enfer finit donc par se décider à aller lui chuchoter à l'oreille quelques messes basses qui estompèrent un instant le sourire de l'angélique. Auguste se jouait d'elle attendant patiemment de voir le déroulement des choses pour, à son tour, rentrer dans l'arènes. Discorde dont il se goinfrait, sourire carnassier plaqué au visage.

    - Il sait Titania. Oh oui, il sait.

    D'un geste d'agacement, elle s'écarta de son étreinte, quittant un instant des yeux le perturbateur. Alors qu'elle se retournait à nouveau vers lui, le fameux militaire avait disparu. Son champs de vision affolé, l'ondine parcourra la foule du regard pour le retrouvé. Elle avait cette peur absurde de devoir le surveiller. Ou bien étais ce lui qui la gardait à l'œil. Que faisait-il là? Seul les chefs reconnus étaient conviés à ce genre d'évènements. Était-il quelqu'un d'important? Si oui, Titania sentait les problèmes arrivés. Et pas des petits.

    C'est alors que, perdues dans ses pensées, elle se heurta en arrière à un dos infranchissable. Collision qui manqua de peu de la faire vaciller de nouveau quand une main se referma sur sa hanche, lui évitant la chute. Dans un reflexe malencontreux, elle s'excusa platement avant de lever la tête et de tomber nez à nez...avec son bourreau. Il était là, tout contre elle. Ce regards terrifiants, elle ne l'oublierait sans doute jamais. Une nausée lui déchira les entrailles. Elle était de nouveau à sa mercie.

    - Oh, merci. Veuillez m'excus...vous?

    Lundi 1er Novembre 2021 à 01:44
    Upside

    Corneille d'Aurevilly:

    Ni d'une ni deux, ce n'était pas tombé dans l'oreille d'un sourd. La chapardeuse ne s'était pas faite priée à peine les mots étaient sortis de la bouche du membre de garde. D'un bon en arrière, elle se préparait à suivre le conseil qui venait de lui être donné, lui adressant une ultime révérence avant de le mettre en application, elle fila. Il observa sa silhouette se fondre dans la foule tandis que la forme de sa capeline rejoignait le tissu épais de ses souvenirs. Il se demanda tout de même pourquoi une demoiselle de quartier malfamé aux manières bien indélicates s'était baissée doucement en guise d'au-revoir, ne sachant s'il devait le prendre comme un gage de politesse ou une dernière effronterie avant de s'éclipser sans demander son reste. S'il chassa très vite ses questionnements, la façon dont elle s'était comportée n'allait pas quitter sa mémoire avant quelques temps, audace tout à fait inédite à laquelle il avait dû faire face.

    Quelques instants passèrent avant que le capitaine ne se baisse afin de ramasser l'objet du léger tumulte dans lequel il s'était empêtré un peu plus tôt. La propriétaire avait eu le temps de disparaître, elle-aussi, pendant qu'il était trop occupé à réprimander une voleuse. Il fit donc volte-face direction la caserne de la garde de Marenostre, savant qu'il n'y aurait qu'eux pour s'en charger correctement, avant de regagner le palais où il avait été convié pour diverses raisons.

    * * *

    Les heures étaient passées, se rapprochant dangereusement plus près de cet horaire fatidique que Corneille redoutait lentement. Il n'en avait pas envie et n'avait jamais eu envie d'avoir à se joindre à ce genre d'événements. L'entrevue militaire à laquelle il avait dû participer avait déjà été assez éprouvante comme ça, il manquait plus que quelques mondanités à surpasser avant de reprendre la route pour un voyage dont il se serait bien passé.

    Il ne comprenait jamais réellement pourquoi il se devait de se présenter à ce genre de réunions, faire office de présence, alors qu'il avait des choses cent fois plus intéressantes à faire à Planeceres, des soldats à gérer et des choses à régler. À Marenostre, il n'avait rien appris qu'il ne savait pas déjà et il en allait sûrement de même pour les autres. Ils étaient là, à parler de stratégie et de positions militaires dans un monde qui n'était même pas tant au bord du conflit. Quand une pierre magique aux pouvoirs destructeurs était entre les mains d'un inconnu assez puissant et rusé pour déjouer la surveillance d'Aeriscordo, Corneille estimait qu'il y avait autre à faire de parlementer sur des banalités qui pouvaient être délayées.

    Peu après la fin de leur petite rencontre militaires aux relents amers d'inutilité, on avait fait venir à sa rencontre quelques domestiques pouvant l'aider à arranger son apparence pour coller aux codes vestimentaires stricts de la réception à laquelle il se devait d'assister. N'étant pas un noble, répondant à la bassesse de ses obligations militaires, il n'eut à se voir malmener pour se faire tirer à quatre épingles. Les petites mains en tablier s'occupèrent surtout à lui apporter les éléments de la tenue qu'il aurait à porter le soir, malheureusement contraints de ranger l'armure de fonction avec laquelle il était venu, bien trop usée à son image. Ils finirent par le laisser une fois sa tenue toute apportée et enfilée, ils auraient normalement eu à le coiffer en conséquences mais il furent renvoyés avant même d'avoir pu poser un doigt sur une brosse. Corneille détestait les mondanités et ce qu'il détestait plus que les mondanités, c'était de s'y préparer. Il finit par mettre un terme à sa préparation, se dirigeant à présent doucement vers les lieux où les festivités devaient se tenir.

    Le capitaine entra discrètement, il avait beau être bourru, il n'aimait pas attirer l'attention et encore moins celles du genre de personne pouvant s'adonner à ces événements. Son arrivée fit cependant son petit effet auprès de ses compatriotes de la cité hôte comme ceux qui avaient eu tâche de l'accompagner. Personne n'avait l'occasion de le rencontrer aussi bien apprêté, habituellement négligé, d'une apparence agressive à faire taire les plus bavards. Corneille était habillé d'une armure légère richement ornée de quelques gravures rappelant la finesse de l'artisanat de sa région. Il portait en dessous un uniforme aux couleurs sobrement ternes, rouge et vert emblématiques des champs de Planeceres, aux finitions mordorées cherchant à rehausser l'ennui mortel qui se profilait autour de sa personne. Pendait de ses larges épaules une cape épaisse d'un gris très sombre qui contrastait un peu plus avec la pâleur de son teint, soulignant des traits d'une délicatesse tragiques et emprunts d'une brutalité silencieuse dont les ridules trahissait un vécu que la plupart des gens ici ne pouvait pas comprendre ni même imaginer. Sa crinière blonde avait été coiffée en arrière, une partie de ses cheveux attachés, petite queue de cheval qui se mélangeait avec les cheveux tombant dans sa nuque. Quelques mèches rebelles avaient néanmoins choisi de désobéir, tombant parfois sur son front, indomptables sous les coups de peigne autoritaires qu'il s'était donnés. Sa coiffure dévoilait un visage qui n'avait pas l'habitude d'être aussi dégagé, un regard d'un bleu qui pouvait ironiquement faire penser à l'océan. Corneille avait perdu cette négligence repoussante et faisait une impression certaine chez ses semblables qui eurent presque l'air surpris de découvrir cette facette du capitaine. Il ne faisait d'ailleurs plus aussi peur qu'à l'accoutumée bien que son regard n'ait pas changé. Le voile d'inquiétude qui reposait sur ses épaules avait été levé pour laisser transparaître un autre, plus triste, tandis que la partie droite de son visage était toujours aussi bien cachée sous une étoffe noire, cache-oeil cache misère.

    Les nobles de la cour de Marenostre arrivaient petit à petit, engorgeant un peu plus les lieux, élevant doucement le volume de chuchotements. C'était repoussant. Le chef de garde maudissait cette partie de la population, médisante, cachotière et profondément gâtée jusqu'à la moelle. Les messes-basses se faisait doucement plus intenses, laissant présager l'arrivée de quelqu'un d'important à qui Corneille importait peu d'importance. Les ragots de la noblesses n'étaient pas sa tasse de thé et moins il en entendait mieux il s'en portait. La raison de ce remue-ménage d'un silence relatif finit par apparaître, Mademoiselle Titania Lazuli de la maison des roses Van Der Guilt, annoncée haut et fort par l'annonciateur qui criait les noms de chaque arrivant supposément d'une importance assez notable pour que leur identité soit relevée. Il n'y prêta d'abord pas attention, trop occupée par le désir de ne se soucier de ceux qui arrivaient, il vaqua à ses occupations qui consistaient à se poser dans un coin, marcher lentement le long des murs et répondre quand on lui adressait la parole.

    À mesure que cette demoiselle pour le moins inconnue s'approchait des autres sans réussir à se fondre dans une masse bien trop en adoration devant quelque chose qui échappait au chef de garde, il crut reconnaître ses traits sans réussir à les remettre. Murmures à la volée, elle était au centre des intrigants de la cour, odieux personnages de vices près à dévorer le moindre faux pas, assoiffés par le désir insatiable du drame. Il crut comprendre un peu plus tard qu'elle était cette fameuse noble dont le majordome était un démon, mystère auquel il prêtait au final que peu d'attention. Il n'avait pas les pieds assez empêtrés dans la noirceur de ces endroits pour s'offusquer selon leurs mœurs. Surtout que son esprit était bien trop occupé à essayer de replacer le visage éthéré de la dénommée Titania.

    Véritable fée, elle déambulait dans une tenue si somptueuse que même l'indifférence de Corneille ne put se résoudre à ignorer la richesse de sa robe et la délicatesse de ses ornements. Un regard inquisiteur pesait sur le dos de la jeune femme qui devait déjà évoluer parmi l'hypocrisie ambiante qui parfumait les lieux, jetant de la poudre aux yeux des faux-semblants à chaque salutation qu'elle faisait sans qu'il ne la quitte du regard. Elle finit d'ailleurs par le sentir, ne s'en cachant pas. Mais c'est seulement lorsqu'il croisa son regard qu'il comprit d'où il la connaissait.

    La chapardeuse. La petite voleuse aux mains baladeuses.

    Impossible. Qu'est-ce qu'elle pouvait faire ici? Qu'est-ce qu'une personne de son rang aurait pu faire dans ce genre de quartier, si pauvrement habillée, à s'abaisser au vol de ses habitants? Il ne comprenait pas. Titania leva son verre vers lui pour le saluer bien que ses mains à lui en furent dépourvues, il répondit d'un signe de la tête avant de détourner le regard, circonspect. Il ne pouvait pas se tromper, le souvenir était bien trop frais. Peut-être avait-elle un sosie quelque part en ville? Il fallait qu'il en ait le coeur net, peut-être que la distance lui avait simplement joué des tours. Le capitaine commença donc une ronde dans la salle, avançant lentement afin de l'observer de loin, de voir si elle trahirait quoi que ce soit pouvant infirmer ou confirmer sa terrible hypothèse. S'en suivit alors un jeu de regard plus qu'équivoque, peut-être un peu suspect d'un point de vue extérieur. Qui des deux surveillait l'autre?

    Après quelques rondes à se traquer, Corneille oiseau plus prédateur que proie profitait des danses qui se laissaient porter par la musique au milieu de la salle ainsi que du fameux majordome qui occupa la demoiselle de quelques paroles pour se glisser jusqu'à elle sans se faire trop remarquer, redoutant qu'elle ne lui fausse compagnie à nouveau, filant entre ses doigts comme une petite souris.

    Corneille arriva à sa hauteur, se postant derrière elle, souhaitant de l'aborder doucement, du moins aussi doucement que sa personne pouvait en être capable, avant qu'elle ne se heurte à lui d'un pas en arrière. Il la vit vaciller et l'attrapa par réflexe. Une main posée sur sa hanche menue, il avait retenu sa chute, sentant son corps contre le sien. Lentement, il pencha la tête vers elle tandis qu'elle leva la sienne dans sa direction. Le regard sévère, leurs yeux se plantant chacun dans ceux de l'autre et les mots qui achevèrent la phrase qu'elle venait de lui adresser ne laissèrent plus aucun doute. C'était bien elle. Elle était si richement habillée et coiffée, visage aux traits angéliques qui l'avait déjà fait douté lorsqu'il l'avait détaillé plutôt dans la journée mais jamais il ne serait risqué à la penser venir de ce genre de milieu, aristocrate perdue dans la saleté des bas-quartiers.

    - Je pourrais vous retourner la question. Vous?

    S'il s'était permis de la tutoyer lors de leur première rencontre, il ne se le permit pas ici. Son rang ne ne lui permettait pas, seulement humble serviteur d'une noblesse dont il n'était pas sous la tutelle en temps normal, mais seulement pour la soirée, en tant qu'invité. Toujours penché, près de son oreille, il lui adressa sur le ton de la confidence afin que les oreilles mal avisées ne fassent moins téméraires:

    - Quel hasard.. J'aurais bien quelques questions.

    La musique précédente touchait à sa fin et la posture singulière dans laquelle ils se trouvaient n'allait pas échapper aux yeux les plus attentifs. Si leur échange pouvait intriguer les gens qui les entouraient, une danse serait sûrement ce qui attirerait le moins l'attention des plus mal avisés. D'un pas sur le côté, sa main quitta le flanc de la fée et il a contourna pour se retrouver face à elle, lui offrant cette même main pour l'inviter à rejoindre ceux qui dansaient déjà.

    - M'accorderiez-vous cette danse?

    Lundi 1er Novembre 2021 à 14:21
    AUREUM.UMBRA

    Titania L. Van Der Guilt:

    Il avait savamment quitté ses distances pour venir à sa rencontre, brisant l'insidieux petit jeu qui c'était immiscé entre eux. Quelques mots fatalistes échangés balayèrent d'un revers les dernières hésitations qui pouvaient subsister. C'était bel et bien lui, méconnaissable. Le garde n'avait plus rien à voir avec le géant de sombre quelle avait croisé plus tôt dans la journée. Sa main vive non plus accrochée à son col mais échoué à présent sur sa hanche. Ses cheveux relevés dégageait un visage bien plus distingué. On pouvait presque y trouver une douceur sourde de violence. Captivant de son étrangeté. Il avait abandonné le terne de l'armure, meurtrit pas bons nombres de combats, pour l'élégance d'une parure luxuriante. Une beauté sauvage qui courait le long de ses bras. Une posture droite qu'adopte souvent ce genre de haut placé et qui leur donne l'attraction mystique du pouvoir. Le personnage dégageait un calme écrasant qui aurait presque put être rassurant - voir plaisant - si Titania ne se trouvait pas en si mauvaise posture.

    Le cœur de la fée s'arrêta de battre. Elle retint son souffle d'effroi quand l'évidence la frappa au visage. Si proche l'un de l'autre il n'y avait plus de place au doute. Un tas de questions se bousculant à l'orée de ses lèvres. L'homme penché contre elle lui chuchota une phrase qui fit frémir ses limites. Elle allait devoir être habile. Allait-il la faire chanter? Que voulait-il tant lui demander? Il la libéra pour venir lui tendre cette poigne qu'elle redoutait tant. Une invitation à danser. Titania acquiesça en déposant d'un geste délicat ses doigts dans sa paume aussi pâles que la sienne. Sans doute une valse serait-elle plus adéquate pour discuter sans trop attiser les passions. Il allait falloir se fondre dans la masse pour ne pas se faire surprendre. La conversation se profilait houleuse et compromettante. Hélas, ce n'était pas une mince affaire tant l'un comme l'autre semblait dénoter parmi les convives. Personnalités surprenantes et magnétiques qui se lancent dans quelques pas gracieux.

    - Avec grand plaisir.

    Plaisir n'était sans doute pas le terme exacte pour d'écrire l'état émotionnel intérieur de mademoiselle Van Der Guilt. Elle redoutait ce cavalier à la curiosité ardue. Mais comment lui en vouloir? A sa place aussi elle aurait été bien intriguée et puis elle avait bon nombre de questions à poser également. Implacable et tentant de garder son sang froid, ils s'avancèrent donc main dans la main vers la piste de danse où tournoyaient déjà jupons et plastrons. Elle se plaça en face de lui, plongeant son regard droit dans le sien. Titania ne put s'empêcher de noter la couleur électrique de son œil encore viable, l'autre couvert présentait une interrogation de plus pour sa jolie petite tête. Comment cela lui était-il arrivé? Un combat surement.  Elle sentit la main de l'inconnu se loger tout contre sa taille fine. La sienne s'égara sur son épaule masculine.

    A la symphonie des violons, ils s'élancèrent. Rondes singulières entrainées par la musique. Grandioses, ils l'étaient. Elle si belle, lui tout autant. Captant murmures et soupçons sur leur passage, ils ne passèrent hélas pas inaperçus. Il se débrouillait drôlement bien, ses jambes emboitant les siennes. Pas séduisants, parfois il la faisait tourner dans un mouvement maitrisé. Titania décida donc d'ouvrir les hostilités et se collant un peu plus contre lui. Les invités prendrait sans doute cela pour de l'affection. Il fallait mieux à ses yeux se faire croire attirés que de prendre le risque de se faire surprendre. Son lacet de métal rencontra le torse solide et elle se hissa jusqu'à l'oreille de son interlocuteur. Murmure suave tout à fait charmant si le sujet ne fut pas si grave pour elle. Son bassin connaissait bien trop les usages, cela le trahissait.

    Vous n'êtes donc pas un simple garde, je me trompe? 

    Mieux valait connaitre son ennemis. Titania, sans quitter le contact rapproché de leurs corps, poursuivit à voix toujours aussi basse. 

    - Je suis curieuse de connaitre votre nom.

    Lundi 1er Novembre 2021 à 16:14
    Upside

    Corneille d'Aurevilly:

    Les derniers pas de danses résonnèrent sur le sol marbré de la salle de réception tandis que la musique s'estompait doucement dans le brouhaha des bavardages. Ses yeux tombaient sur elle comme une cascade, cherchant dans leurs courants à sonder les pensées qui devaient fourmiller derrière le regard maitrisé qu'elle lui portait. Ni l'un ni l'autre ne laissait transparaître les intentions profondes qui bordaient leurs actions. Titania devait deviner sans aucune difficulté ce que sa proposition devait impliquer, se trouvant dans la position délicate de de se voir compromise dans quelques histoires qu'elle n'aurait pas voulu voir survenir. Elle posa donc sa main dans la paume que le capitaine lui servit, contact bien plus doux et poli que celui qui les avait secoués plus tôt dans la journée.

    Les musiciens achevèrent leur morceau pour mieux démarrer le suivant, les instruments reprirent leurs droits sur les lieux, emplissant encore une fois les murs du banquet de leur mélopée, quelques temps guidant une nouvelle valse dans la soirée. Les deux inconnus qui ne l'étaient plus tant que ça s'avancèrent vers la piste où tournaient à nouveau quelques gens comme s'ils allaient s'adonner à la plus banale des valses, danse polie qui n'aurait dû intriguer personne, leur position respective pouvant cependant attirer quelques regards malheureux bercés de questionnements. Titania s'avança un peu plus près de lui, posant une main sur son épaule et lui déposant la sienne sur sa taille. Leurs pas commencèrent à s'élancer, suivant le rythme dictés par les notes de musiques. Si Corneille n'était pas un fervent danseur, il avait connaissance de ces règles d'une bienséance malheureuse, apprenant à suivre les pas de ses partenaires comme de les guider, science ancré dans un pan de sa mémoire sans qu'il n'eut jamais trouvé l'envie de l'appliquer. Il emboîtait ses pas avec une grâce pour le moins surprenante, d'une certaine raideur trahissant peut-être le fait qu'il n'avait jamais réellement danser avec qui que ce soit, encore moins avec une partenaire aussi légère.

    Leur petit jeu ne passa pas aussi inaperçu que souhaité mais les plus fouineurs eurent encore l'amabilité de ne pas se faire trop entendre, pour le moment. Les deux profils qui se faisaient face était une association atypique qu'il fut surprenant de remarquer, donnant éventuellement le bénéfice du doute à une curiosité mutuelle qui les avait poussés à se rencontrer. La beauté saisissante de la demoiselle devait avoir capturé bien des regards à son arrivée et l'audace revenait simplement à ce capitaine de garde qui avait osé lui demander sa main, pour danser.

    L'ondine se rapprocha un peu de lui, anéantissant le peu d'espace que l'intimité d'une valse pouvait leur laisser et se hissa jusqu'à son oreille pour lui murmurer discrètement quelques mots. Les chuchotements étaient monnaie courante parmi les nobles et parler à voix basse était un domaine dont ils étaient les plus grands artistes. La voix doucereuse de Titania lui adressa ses doutes quant à son identité qu'il s'était encore bien gardé de lui révéler jusqu'à présent et lui demanda dans une politesse distinguée comment il se nommait. Le visage tourné vers elle, assez proche pour se permettre de lui répondre sur le même ton, il lui répondit.

    - Vous avez raison, mademoiselle Van Der Guilt.

    Il marqua une légère pause, sans rompre le contact rapproché qu'elle avait instigué.

    - Je me nomme Corneille d'Aurevilly, capitaine de la garde de Planeceres pour vous servir.

    Pour la servir du moins pour une nuit, le temps de rester avant de repartir pour ses contrées à lui.

    - J'ai cru comprendre que vous non plus, vous n'êtes pas celle que vous laissiez paraître.

    Lui aussi, il se posait quelques questions quant à sa présence sur les lieux à jouer les larronnes dans un milieu auquel elle n'appartenait pas. Les gens de sa classe se risquaient rarement à se rendre ici, comme n'importe qui qui n'avait pas à y vivre, d'ailleurs.

    Corneille se pencha un peu plus, lui glissant discrètement d'une voix grave quelques mots qu'il serait malheureux d'être entendu par des oreilles déplacées, même seulement à moitié.

    - Vous faites souvent du charme aux gardes qui croisent votre route?

    Son numéro semblait bien préparé, aisance effarouchée à user savamment de ses charmes pour quérir la pitié de ses interlocuteurs, à moins que ce ne soit l'adrénaline qui l'ait dotée de ces mimiques suaves.

    - Route qui prend des tournants pour le moins hasardeux.

    Mention aux bas-quartiers dans lesquels il n'était pas attendu de la retrouver.




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